Le lendemain, je m’offre ma première journée « off » après 8 jours à changer de ville ou d’hôtel tous les jours. Je rattrape un peu du retard sur mon blog, et je me pose dans le jardin de ma très sympathique « guest house » pour discuter un peu. J’ai d’ailleurs commencé en m’incrustant (en partie involontairement) au déjeuner avec les femmes travaillant là. J’étais le seul étranger à table, et je ne l’ai pas regretté! Les blagues ont fusées (traduites par celles qui parlaient anglais), et la vieille mère m’a bombardé de questions. A la fin du repas, elle a fait une prière pour bénir « l’étranger qui était venu jusqu’à nous ». Lors du thé, une Iranienne s’est jointe à nous, et a commencé à parler aux autres femmes. Ses paroles étaient aux 2/3 en persan (la langue de l’Iran), et le reste en anglais. En effet, les habitants de Samarkand ne parlent pas l’ouzbek mais le tadjik, qui n’est autre qu’un dialecte du persan. D’ailleurs, la plupart des habitants de l’Asie Centrale se décrivaient jusqu’au début du XXème siècle comme des «Perses» ou des « Turcs ». Toutes les nationalités « Ouzbèque », « Tadjik », « Kirgize », «Turkmène» ou « Kazakh » seraient donc avant tout l’invention des Soviétiques. Encore eux… Le prochain post est d’ailleurs consacré à tous les aspects « macros » de l’Asie Centrale.
2.6 – Ouzbekistan – Samarkand & Boukhara
Written by admin on 26 octobre 2010 – 14 h 44 min
Je partis tôt le matin vers Samarkand, dans ce que les Ouzbeks appellent fièrement leur « Train à Grande Vitesse ». Ils s’emballent peut être un peu, la vitesse maximale de ce train fièrement baptisé « Shark » devant tourner autour des 100km/h… A moitié endormi (la nuit chez Ali n’ayant pas été du meilleur confort), j’ai donc tout le temps d’admirer le paysage. Les champs de coton succèdent aux plaines désertiques, comme Erik Orsenna le décrit si bien dans son livre Voyages aux Pays du Coton. La « monoculture » du coton (comme elle est appelée ici) a en effet commencé au temps des Soviets. Ceux-ci, fans de l’exploitation extensive des ressources et désespérés d’obtenir des devises sur le marché international, ont transformé ce qui était alors la RSS d’Ouzbékistan en une gigantesque machine à fabriquer du coton. La quasi totalité des terres arables y ont été consacrées, tout comme (plus grave) une grande partie des ressources en eau. La Mer d’Aral, immense lac à cheval entre l’Ouzbékistan et le Kazakhstan a été siphonnée à 50% depuis les années 1960, soit l’une des plus grandes catastrophes écologiques du XXème siècle. Cette monoculture continue d’ailleurs encore aujourd’hui, au depend des cultures vivrières et des interets des populations locales, mais pour le plus grand bénéfices des politiciens qui s’en serve de monnaie d’échange avec la Chine…
Prendre le train en Ouzbékistan, c’est aussi passer des heures (jusqu’à 8…) à subir la télé du train crachant à plein volume des programmes plus cocasses les un que les autres. Tout y est passé: les clips de musique pop russes, des soaps opéras locales, des films de Bollywood traduits en ouzbek, etc.
Une fois arrivé à Samarkand, je me lance à l’assaut des principales attractions de la ville. Et là, même si l’architecture antique n’était pas le but premier de mon voyage, je dois avouer que j’ai été subjugué par le fameux « Registan ». Cet ensemble de 3 moquées et madrassas (écoles coraniques) se faisant face est tout simplement hors normes, en particulier pour des bâtiments construits entre le XIVème et le XVIème siècle! Une fois à l’intérieur (après avoir acheté un billet « foreign tourist » 20 fois plus cher que le ticket pour locaux), un policier m’accoste pour me proposer de monter en haut du minaret. C’est complètement illégal, bien sur, et je comprends pourquoi en grimpant vers le sommet: les escaliers du début sont branlant, le chemin n’est pas indiqué, et les escaliers de la fin sont tellement raides et étroits qu’il est très difficile de s’y croiser. Une fois arrivé en haut, en revanche, la vue sur la ville et ses principaux bâtiments est extraordinaire. Sur le chemin du retour, les touristes s’amusent à comparer combien chacun a du payer le garde pour monter. Apparemment, j’ai payé 10% de moins que tout le monde :-). Une fois redescendu, je pars visiter le reste de la ville. Après de nombreuses mosquées et madrassas, je rejoins un vieux cimetière indiqué sur le guide. La partie à visiter est vite expédiée, et je ressors par le cimetière « moderne » pour profiter d’une vue de la ville depuis le haut de la colline. Les dates inscrites sur les tombes indiquent que l’espérance de vie ici est bien basse. La moyenne semble être autour de 60 ans (ce qui correspond aux statistiques que j’avais lu sur la Russie), soit près de 20 ans de moins qu’en France. L’écart de développement n’explique pas tout: la Vodka, entre ses ravages sur la santé et toutes les agressions auxquelles elle conduit, a également sa part de responsabilité…
La journée s’est terminée par une « promenade » dans Samarkand à la recherche d’un cyber-café. Le Lonely Planet m’a fait marché des kilomètres dans le noir pour rien, et le seul café que j’ai pu trouver était un repère de jeu en réseau. D’ailleurs, voir une dizaine de jeunes jouer à Counter Strike et hurler à chaque fois qu’ils arrivaient à tuer un copain m’a étrangement rappelé les salles de jeu en Chine. Même jeu, même ados geeks, même odeur… la mondialisation se retrouve parfois dans les endroits les plus inattendus!
Le lendemain, départ pour Boukhara en train. Boukhara est également l’une des villes mythiques de la route de la soie, mais elle ne possède pas de monuments aussi impressionnant que Samarkand. En revanche, la vieille ville s’étend sur des kilomètres et est restée assez authentique. Je m’y suis enfoncé en cherchant à m’y perdre, et c’est vrai qu’elle a un charme fou, et que les habitants y sont très accueillant! Beaucoup m’ont d’ailleurs demandé de les prendre en photo, et j’ai pu réaliser des clichés très sympa. J’ai également visité la ville moderne, son stade de foot ouvert à tous, et son château d’eau soviétique. Une sorte de mécano géant, guère rassurant, mais extrêmement drôle à monter. Et avec une vue magnifique! Ma chambre était également très intéressante. Nichée à l’intérieur d’un ancien caravansérail, celle-ci était petite, avec juste une sorte de matelas et des couvertures posées par terre, mais elle devait assez bien ressembler à ce qu’était les chambres des voyageurs à l’époque. Un petit moment sympa dans ma route de la soie…
Après Boukhara, il était désormais temps pour moi de clôturer cette aventure chez les Soviets. Je suis donc reparti en train à Tachkent, j’ai visité l’immense bazar de la ville, et je suis arrivé à l’aéroport. Là, un comité d’accueil impressionnant m’y attendait, ou plutôt attendait les membres de l’équipe d’Ouzbékistan de Water Polo. Ceux-ci revenaient victorieux d’une compétition, et la télévision locale les a interviewé pendant 30mn devant un immense drapeau Ouzbek. Un nombre incalculable de contrôles de sécurité plus tard, je me suis retrouvé dans le vol le plus improbable de mon voyage, à savoir un vol Tachkent – Delhi assuré par Uzbekistan Airways. J’ai donc finalement quitté l’empire Russe et les « marches » de son empire pour une autre grande civilisation aux contours compliqués: l’Inde.
C’est parti pour 15 jours complètement fous!
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ahhh ! tu vois bien que tu cherches à te perdre dans les villes !!! tu l’as écrit, là ! et que tu montes dans des tours improbables… take care
Merci pour ces lignes passionnantes, je voyage avec toi par la pensée, et c’est comme si nous y étions ; avec un peu de décalage, on a bien reçu ta carte postale du fameux « Registan ». Cet ensemble de 3 moquées et madrassas (écoles coraniques) superbes et harmonieuses.
la chute du 2.4.2 sur Samarkand et douce à mon oreille… Poète avec ça, mon fils ! toutes les qualités, toutes…. je l’ai toujours dit !
Coucou
Ca y est j’ai lu le post sur Samarkand!
Merci de ton beau témoignage, décidemment, ca fait rêver!!!
Bises
Mathilde
On s’y croirait! Et j’adore le passage de la femme qui bénit l’étranger!! top! bisous
coucou!
je fait de l’IDD et je travaille actuellement sur Samarkand donc je voudrai 2 3 infos dessus !
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