Le lendemain je décidai de visiter la ville principalement à pieds. Tashkent est une cité assez particulière, une sorte de croisement entre une agglomération américaine de taille moyenne et une ville chinoise. Capitale sans vrai centre-ville, Tashkent est une succession de lotissements perdus entre les arbres et de quelques immenses avenues découpant des barres d’immeubles de taille moyenne. Mon hôtel étant confortable mais un peu cher, je me mis donc en quête d’un hébergement meilleur marché. Arrivé à l’endroit indiqué dans mon guide, je mis au moins 30mn à trouver l’entrée. Et pour cause: la porte était à moitié cachée, les inscriptions affichées l’était en cyrillique uniquement, et le nom de l’hôtel avait été délibérément masqué. Je sonnais quand même à tout hasard, et le propriétaire (le fameux « Ali » décrit par le guide) vint m’ouvrir avec un grand sourire. Il me dit « drink now, talk later », et m’amena dans une sorte de salon / salle à manger. Trois autres hommes y étaient attablés, et étaient en train de finir leur déjeuner. On m’offrit un peu à manger, puis un verre de Vodka, puis 2, puis 3, puis (il était 15h30!) je finis par réussir à passer à la bière. Comme je remerciai en russe celui qui me servait, il me répondit sèchement « Here not Russia. Please speak Uzbek ». Et il essaya de me faire prononcer correctement le fameux « merci » ouzbek, soit « rar-mar » avec 3 « r » roulés d’affilés. Moi qui n’ai jamais réussi à en prononcer un seul! Quelques minutes plus tard d’ailleurs le fameux type quitta les lieux, et Ali vint me voir. Il me raconta que l’homme était du KGB, et était venu l’espionner pour lui soutirer des bakchichs. Apparemment Ali avait toujours refusé de payer, ce qui lui a valu de perdre la licence de son hôtel. Cependant, vu que le prix était attractif, que l’hôtel était près du métro et que je sentais que la soirée allait être dépaysante avec Ali, je décidai de m’installer là pour la nuit.
J’ai passé le reste de la journée à acheter mon billet de train, changer de l’argent, ramener mes affaires depuis l’autre hôtel, etc. Et le moins que l’on puisse dire c’est que j’ai marché des kilomètres pour faire tout ça, et que je ne manque pas d’anecdotes! Par exemple, j’ai découvert que de discuter avec les policiers gardant la Banque d’Ouzbékistan peut entrainer des conséquences assez inattendues. A peine arrivé, le garde me demande pourquoi je veux entrer. Quand je lui dit que c’est pour retirer de l’argent à un distributeur, il me répond: « Hmm, veux tu changer des dollars? Je te fais un bon taux ». Je lui explique que non, mais comme il s’entête à ne pas me laisser passer, je lui demande quel est son taux. Celui-ci étant effectivement plus intéressant que le taux officiel, je fini par accepter, et il me serra chaleureusement la main en partant!
Pour rentrer, je fini par prendre le métro. Celui-ci ayant été conçu à la base pour être un abri antiatomique, les photos y sont formellement interdites. Devant une telle aberration, je n’ai bien sur pas pu m’empêcher de me planquer derrière un pilier et de photographier l’une des magnifiques gravures qui ornait les murs… Sauf que mon flash a cru intelligent de se déclencher à ce moment là! L’Ouzbékistan étant un état où la police est omniprésente, 2 molosses ont débarqué immédiatement (il y en a 2 postés en permanence de chaque côté du quai), et m’ont dit « Delete, delete ». Je n’ai évidemment pas discuté, et ils sont partis l’air très satisfaits. J’ai en tous cas bien retenu la leçon: les photos suivantes, je les ai prises sans flash et avec mon téléphone portable!
Une fois revenu chez Ali, je me suis retrouvé projeté en Union Soviétique. Ali était avec trois autres amis, et ils enchainaient les verres de vodka et les cigarettes. Au fur et à mesure de la soirée leurs phrases se faisaient moins nettes, et ils titubaient de plus en plus. D’ailleurs, celui qui paraissait le moins saoul m’a demandé près d’une dizaine de fois (en 30mn) où j’allais le lendemain, et si je prenais le bus ou le train. Juste avant de partir se coucher (il était 21h), Ali vint me voir et me dit: « Tu vois, on n’a pas changé depuis l’Union Soviétique… »
D’ailleurs, une fois dans ma chambre, le voyage en URSS se poursuivit. La déco était tellement kitsh et rétro que cela en devenait comique. Les lampes étaient bien sur cassées et les tapis rapés, mais cette chambre n’avait pas du beaucoup changer depuis la chute du mur, et elle donnait un goût de ce qui avait été le quotidien des habitants vivant derrière le mur. Un quotidien pas vraiment rose…
Le lendemain, l’heure était venue de partir à la conquête des villes mythiques de la route de la soie. Direction Samarkand et Boukhara!
juste énorme
tu vas pouvoir parler uzbek à ton retour
ca n’a pas de prix
Trop bien!!!!
J’ai hâte de voir les photos collector prises au péril de ta vie!
mais une fois l’angoisse passée, je t’avoue que tu me fais toujours autant rire ! et que des anecdotes aussi croquignolesques, c’est un vrai bonheur à lire !
Et ca, c’est priceless!!